POPPIES

2005

Digital prints / oeuvre numérique

INSTALLATION VIEWS

Poppies and Prosopopoeia

By Christine Unger

It is hardly surprising that images of fish recur in Bonnie Baxter’s oeuvres. Her works live in a liquid state where elements exist simultaneously on many planes. She has acquired a personal iconography of recurrent images whose nuanced meanings relocate easily, fluidly, from one series of work to another, regardless of medium: print, video, or installation. Her work is full of paradox co-existing comfortably and provocatively in a memory-scape where the frameworks of time and probability do not apply. These paradoxes supply her work with humour and humanity.This most recent of her series, Les coquelicots is perhaps her most fluid print series yet. It is a deeply inward exploration moving toward a surface that is explored in a final epic image.

The poppies of Les coquelicots bind the work with their crimson and scarlet, their dark hearts and oddly human hairy green stems and leaves.Their effect is narcotic, erotic, and surreal. From a distance the flower’s grand scale seduces the audience with a luxuriance of vibrant complimentary colours and suggestive curves and folds. Once drawn closer to the surface of the work the onlooker is pulled into a dreamlike tale of contradictions, point and counterpoint overlapping.

There is a kind of postmodern Romanticism at work here amidst the beautiful surreal imagery and its allegory of transition and psychological sublimation. Embedded in the verdant greens and fiery reds are figures, sleeping or even past sleep? – their state remains ambiguous – dwarfed by the monumental scale of the flowers of memory, insignificant and safe in the overwhelming processes of nature. Patterns and architectures provide disquieting layers of mortal human imposition, lines too straight and too regular. But always again, subsumed by unstoppable growth, which seems at times to take on a self-aware posture, to anthropomorphize, to mimic us in humorous poses like some vegetable avatar.Throughout, a fish reappears in tragic-comic disproportion, first curious, then gasping for air above a cracked and arid plane, finally turned on its side, one pleading eye looking out from the unfamiliar green darkness of some exotic oriental garden.

Out of the dense interiors of Les coquelicots series there is a sudden opening-out onto a vast landscape. Coming out of sleep – après mouchetache is an allegorical battleground. There is a secret sub-context here evident in the obscurity of the source imagery, but a more universal meaning is implicit in the juxtaposition of elements, each laden with emotional content and strong tactile and metaphorical memory triggers. Not fish now, but fish hooks, tiny ornate “fishing flies” swarm the landscape, dominated by a single super-sized predatory “fly” (mouche), vain and commanding in its gorgeous feathering and heroic scale.Violent splashes of ink (tache) bombard the surface. Adrift across the canvas, a beautiful carnage, are transparent poppies, and underlying everything are the elegant mechanical lines of printed money. At its side is a companion print. Within the linear regularity of the queen’s dollar-face, one realistic blue eye is finally open and literally ‘hooked’, witnessing the consequences of war, perhaps ready to quit the role of bystander.There is no division here between the mundane and the sacred, the personal and the global, conflict is a flavour that exists without scale, from the individual struggles of a fish out of water to the multinational, money driven conflicts that are set to characterize the first decade or our new century.

Despite its garden scenery Les coquelicots lives beneath the surface of air and light: almost claustrophobic in its dense population of overlapping metaphors.There is a mysterious allegory at play here, a personal metaphysics, laden with a sense of change, transition, an enjoyment of process, and a dread of where it may be leading.This is a work on memory that has nothing to do with nostalgia. We are journeying with the artist towards a new surface which offers a broader perspective of the world, the clear view of someone coming out of profound and dream filled sleep to see the world with refreshed and critical eyes, tongue in cheek, spirit intact, an eye to the future.

 

Pavots et prosopopées

Christine Unger
Traduction : Nathalie De Blois

Les coquelicots cramoisis et écarlates, avec leurs cœurs sombres et leurs appendices verts, velus, étrangement presque humains, établissent un lien entre les œuvres de la série d’impressions numériques1 Les coquelicots de Bonnie Baxter. Ils ont un effet narcotique, érotique et surréel. De loin, l’ampleur majestueuse de la fleur séduit par la luxuriance de ses couleurs vibrantes et complémentaires, par ses courbes et ses plis suggestifs. De près, le spectateur est entraîné dans un récit onirique tout en contradictions, en points et contrepoints.

Une forme de romantisme postmoderne œuvre au sein de cette belle imagerie surréelle, de cette allégorie du changement et de la sublimation. Enfouies dans cette végétation verdoyante et dans ces rouges flamboyants apparaissent des figures, endormies peut-être – ensevelies par la monumentalité des fleurs de la mémoire, insignifiantes et à l’abri au sein d’une nature généreuse. Des motifs et des structures architecturales introduisent des perspectives troublantes qui témoignent de l’intervention humaine : des lignes trop droites, trop régulières. Mais celles-ci sont toujours enserrées par une nature irrépressible qui semble se moquer de nous, à la manière d’un avatar végétal qui nous imiterait en adoptant des poses étudiées. Ici et là, apparaît un poisson disproportionné de manière tragi-comique. D’abord curieux, puis suffoquant au-dessus d’un monde aride et crevassé, il se montre ailleurs sur le côté, le regard implorant depuis la sombre et mystérieuse verdure d’un jardin oriental.

Enfin, nous rejoignons la surface dans une pièce héroïque. Coming out of sleep – après Mouchetache est un champ de bataille allégorique. Un contexte sous-jacent se dégage avec évidence de cette obscure image source, mais une signification plus universelle émane tacitement de la juxtaposition des éléments, porteurs d’un contenu affectif et de puissants stimuli de la mémoire tactile et métaphorique. Ce n’est plus ici un poisson mais de minuscules mouches artificielles (utilisées pour la pêche), très ornées, qui fourmillent dans le paysage dominé par une immense mouche prédatrice, vaniteuse et souveraine avec sa superbe livrée et sa taille héroïque. Des taches d’encre bombardent violemment la surface. Dans ce beau carnage flottent des coquelicots transparents avec en arrière-plan les lignes mécaniques d’un billet de banque. Une œuvre voisine lui fait pendant. Au sein de la régularité linéaire du visage de la reine sur le billet, un œil bleu traité de manière réaliste est enfin ouvert, littéralement « accroché », tel un témoin des conséquences de la guerre, prêt, peut- être, à abandonner son rôle de simple spectateur. Ici, il n’y a aucune séparation entre le commun et le sacré, entre le personnel et l’universel; le parfum du conflit fait abstraction des hiérarchies. Les sous-entendus sont à la fois évidents et profondément pertinents dans le contexte actuel.

Malgré sa mise en scène de jardin, Les coquelicots, comme poussé vers la claustrophobie dans cette nuée de métaphores qui se chevauchent, se terre sous la surface, à l’abri de l’air et de la lumière. Une mystérieuse allégorie est ici en jeu, une métaphysique personnelle chargé des notions de transition, du plaisir associé au processus créatif et de la crainte de l’endroit où il peut mener. Ce travail qui porte sur la mémoire n’a rien à voir avec la nostalgie. Nous voyageons avec l’artiste vers un jour nouveau qui offre une vaste perspective sur le monde, la vision éclairée de quelqu’un qui, s’éveillant d’un sommeil profond et rempli de rêves, regarde le monde avec des yeux grand ouverts, l’esprit ironiquement intact, un œil tourné vers l’avenir.

Les images de Les coquelicots sont partiellement tirées du vidéo Surreal de Bonnie. L’artiste a bénéficié de l’aide de Tommy Asselin et de Étienne Fortin.