ROSE DÉSARROI
2010
Colophon
Rose Désarroi
Cet ouvrage comprend un texte inédit de Denise Desautels
ainsi que cinq impressions numériques de Bonnie Baxter
réalisées sur papier Moab par Photosynthèse.
La conception et la réalisation du livre sont de Jacques Fournier
en collaboration avec Michael Eifert (bois) et Jacques Ladouceur (métal).
L’édition originale comprend onze exemplaires numérotés de 1 à 11
et deux exemplaires de dépôt légal marqués D.L. I et D.L. II
tous signés par l’auteure et les artistes.
Ex. n°
Éditions Roselin, Montréal 2010
© Bonnie Baxter, Denise Desautels, Jacques Fournier
ISBN 2 – 921751 – 35 – 6
Rose Désarroi
Denise Desautels
d’habitude les yeux portent, même lourds / qui sommes-nous, de dos, sans miracle / les arbres aujourd’hui n’existent presque plus / la pierre seule, masse vert vif / les bras et le cuivre qui gît par terre / corps de désir ou de désordre / visages aveugles au ras du sol, crevés / leur immensité pleurant, bruissant
d’une scène à l’autre, c’est pareil / l’univers en deux / qui sommes-nous / fatales, bataillon de blondes sous le turquoise / épiant ciel clos et carcasses / ce qu’il y a de feu, ce qu’il y a d’épées derrière les masques / dans l’autre langue soudain / l’autoportrait, sa résonance / pointée vers l’infini, who am I
le rêve d’emprunt ironise violemment / entre rose désarroi et végétation monumentale / who am I, perruque plaquée en plein voyage / terre bouffonne, je joue / jaune graffiti à la une, avec maintes femmes / nos nuques aux aguets sous l’éclaboussure / nos mains comme des mouches / hors cadre, ça murmure
ça dit grand, la regardeuse regardée / l’océan dans la peau / assise, humaine sans condition / mon oeil droit devant mord / la moitié encre du tableau, son pan d’écume et d’histoire / juste au bas de l’autre, l’ocre, l’agitée / tachée d’objets tranchants qui volent / voyez de près le va-et-vient / je pars mais ne quitte pas
touchez / collez un seul mot, passage / côté empreinte et plage, mes ongles creusent une pensée / dépouille et pas recto verso / avec l’automne poignant comme preuve / de gauche à droite à gauche, là / soleil de profil, je ne cède pas / éclatante et ombre sur mes gardes / je ravage, caresse / parfois touche le fond
Rose Disarray
Denise Desautels (translation: Alisa Bélanger)
usually the eyes gaze, even heavy / who are we, from behind, without miracles / the trees today hardly exist anymore / only the stone, bright green mass / the arms and brass that lie on the ground / bodies in desire or disorder / blind faces against the soil, exhausted / their immensity crying, clamoring
from one scene to another, it’s the same / the universe in two/ who are we / battalion of fatal blonds under the turquoise/ on the look-out for closed sky and carcasses / what there is by way of fire, by way of swords behind the masks / in the other language suddenly / the self-portrait, its resonance, pointed toward the infinite qui suis-je
the borrowed dream is violently ironic / between rose dismay and monumental vegetation / qui suis-je, a wig ditched in the middle of a trip / land of jest, I’m playing / yellow graffiti as first-page news, with so many women / our necks lie in wait under the splatter / our hands like flies / beyond the frame, it murmurs
it says much, the watching woman watched / the ocean in the skin / sitting, human with no condition / my eye sinks right in straight ahead / the ink half of the picture, its patch of froth and history / just beneath the other, the ochre, the agitated woman / stained by sharp objects that fly / look well, you, at the comings-and-goings / I’m leaving but don’t depart
touch, I tell you / stick a single word, passage / print and beach side, my nails scratch a thought deeper / skin hide and recto verso step / with the poignant autumn as proof / from left to right to left, there / sun in profile, I don’t yield / radiant woman and shadow on guard / I ravage, stroke / sometimes touch rock bottom